Universités québécoises : la leçon de gestion !
Il n’est pire sourd
que celui qui
ne veut pas entendre.
Il n’y en aura pas de leçon ! Qui peut faire la leçon à ceux qui font la leçon ? Proposer une saine gestion des universités est une hérésie. Un crime de lèse-majesté. Les plus hautes instances de la connaissance, de la science et de la recherche taxées d’un titre de mauvais gestionnaires ! Voyons, ils sont au-dessus de toutes ces vicissitudes que l’on attribue normalement aux vassaux. D’ailleurs, les recteurs et autres directeurs de ces institutions du savoir nous assurent qu’ils ont déjà coupé à l’os. Par contre, l’immobilier, une vision de la démesure et quelques châteaux de type « îlot voyageur » nous rappellent curieusement une époque féodale. Mais les conseils d’administration de ces nobles institutions sont englués dans des privilèges à la hauteur de leur rang. Seul le manque d’argent confère de l’importance à celui-ci !
L’insoutenable « saine » gestion
En pleine crise étudiante, Madame la Ministre Beauchamp propose, pour calmer la rage des étudiants, de se pencher sur la saine gestion des universités. Mis à part Radio-Canada, dimanche le 15 avril à 18 heures, qui reprend intégralement les paroles de madame Beauchamp, le mot saine utilisé avec gestion est rapidement remplacé par le vocable « meilleure » pour qualifier gestion.
Pourtant, cette fois, le gouvernement, par la voix de sa ministre, a visé dans le mille, en plein cœur du problème : celui d’une philosophie de gestion, gentille et tolérante. Invoquer une saine gestion est un rappel à la responsabilisation des gestionnaires qui agissent à titre de fiduciaire et de mandataire des fonds publics.
Du « baume » pour les dirigeants molasses !
Le Larousse nous apprend que le mot meilleur au premier degré est un comparatif de « bon ». Associé avec la gestion ou le management des universités, le vocable tente d’exprimer un comparatif avec quelque chose d’existant, une situation bonne, par exemple. Utiliser le mot meilleure pour exprimer la gestion d’une université est plus diplomate, parce qu’elle concède que la gestion est bonne, perfectible sans doute, mais pas si mauvaise, somme toute.
Un petit coup de baguette sur les doigts !
Il y a bien eu la semaine dernière un petit problème dans des contrats attribués à des architectes pour la préparation de devis pour des nouveaux bâtiments universitaires. Mais cela est passé sous les radars de l’indignation.
Saine Gestion : un engagement de probité
Utiliser le mot Saine Gestion, c’est un peu plus engageant. Cela laisserait entendre que la gestion aurait des comptes à rendre. Pas seulement sur la transparence de la direction générale envers le conseil d’administration, comme de l’UQAM, lorsque ce conseil doit prendre des décisions pour approuver la construction d’un pavillon, par exemple un « îlot voyageur » et que cette direction générale a jugé bon de ne pas transmettre les vrais coûts de construction juste au cas où le conseil d’administration n’approuverait pas le projet !
Mais il y a aussi l’efficience qui rappelle aux décideurs qu’ils n’œuvrent pas dans le secteur privé et que l’utilisation des ressources publiques doit être assujettie à une plus grande frugalité et à une appréciation entre ce qui est nécessaire, peut-être utile ou seulement accessoire. Ce n’est pas un jugement, c’est une question à débattre !
Parler de saine gestion entraîne aussi de parler d’abnégation, c’est-à-dire de l’abus de pouvoir, d’avantages indus, de ristourne et de conflit potentiel d’intérêts. Il ne faut pas non plus oublier le principe de continuité, celui d’assurer la pérennité des institutions du savoir au-delà de l’administration d’un groupe d’individus. Il y a l’équilibre dans le choix des dépenses, pour éviter la démence des congrès de recteurs et dirigeants à l’étranger dans des conditions princières et outrancières. Tant qu’à comparer avec une époque révolue et médiévale, le modèle des monastères qui offraient le gîte et couvert frugal à la confrérie, pourrait inspirer le monde universitaire. Et finalement l’équité, devant l’incontournable année sabbatique de ressourcement et de formation, il n’y aurait pas que les professeurs qui ont besoin de cette pose professionnelle. Elle est tout aussi nécessaire chez les professionnels pratiquant hors des contextes universitaires. Qui pourrait se payer le luxe de partir, tout salaire et toutes dépenses payées, à tous les dix ans, à moins de récupérer tous ses REER, pour aller étudier en Europe ou aux USA pendant une année ?
Positionnement de « Saine Gestion » : sortir du mythe !
L’approche matricielle et systématique de Saine Gestion est appropriée pour guider une révision des façons de faire managériales et surtout pour ouvrir un dialogue auprès de gestionnaires intègres et compétents. Nous l’avons largement démontré. Le CDSG, les PSGGR, et la matrice des 41 cases sont des outils fort bien articulés.
Sur le plan opérationnel, il est vrai que l’approche matricielle du modèle de Saine Gestion pourrait donner au leader un sentiment de liberté restreinte. Peut-être, certes ! Mais lorsque l’on gère l’argent des autres, une petite gêne, ce n’est pas si mauvais que ça.
Par ailleurs, la notion d’importance relative des PSGGR, qui permet d’exercer la profession de gestionnaire au quotidien, assure une souplesse juste et suffisante. Autrement dit, c’est le contexte, soit la mission et les enjeux d’une organisation qui détermineront l’application des principes de Saine Gestion.
Alors, attention au discours démagogique et surtout à l’usage du sophisme. Saine Gestion n’a rien à voir avec la pureté et le « blanc à laver ». À une autre époque le « blanc à laver » était un produit de nettoyage, associé à une pureté du blanc.
D’ailleurs, la pureté a servi à blanchir plus de crimes contre l’humanité que n’importe quelle rhétorique de règles du gros bon sens. Au cours de la première moitié du XXe siècle, facistes et totalitaristes se sont d’ailleurs drapés dans cette pureté dogmatique et eugénisante. Faites ce que je dis, pas ce que je fais !
Saine Gestion n’a pas cette vocation débilitante. Saine Gestion, plus précisément son approche conceptuelle, vise à supporter la probité du mandataire. Ses valeurs, articulées dans ses principes fondamentaux, sont uniquement liées aux biens et ressources confiés aux leaders et dirigeants mandataires d’une organisation.
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