Rapport « Léonard » et Saine Gestion Municipale
« Imputabilité » Voici le mot clé retenu par Jacques Léonard, ex-ministre péquiste chargé de préparer un rapport sur l’octroi et la gestion des contrats à Montréal. Comment rendre imputable des actes de gestion que les gestionnaires posent ou ne posent pas. Comment auditer de façon probante et concluante ces actes de la gestion ? Là est toute la question ?
La gestion des villes et municipalités aura fait couler beaucoup d’encre depuis quelques années. La mise à jour du scandale lié à la collusion et à la corruption dans plusieurs municipalités du Québec, les arrestations massives cette semaine à Laval et les accusions de gangstérismes portées au plus haut niveau de la gouvernance commencent à ébranler les assises mêmes de la démocratie municipale.
Cette fois Montréal semble emporter la Palme d’Or de la mauvaise gestion. (Sommes nous surpris ?) Le rapport du comité-conseil sur l’octroi et la gestion des contrats municipaux à la Ville de Montréal (rapport Léonard) vient tout juste d’être rendu public. Le constat est dévastateur. À toutes fins utiles, en lisant le rapport, on conclut aisément que Montréal est non seulement mal géré mais aussi totalement ingouvernable. D’entrée de jeux, le rapport pointe 4 facteurs déterminants dans le cas de Montréal.
- Des dysfonctiontionnements au plus haut niveau des structures politiques et administratives de la ville;
- Une vision confuse de la délégation d’autorité, de l’imputabilité et de la reddition de compte;
- La confusion générale engendrée par le mouvement « fusion-défusion » dans les compétences et les lignes d’autorité, alors que l’imputabilité et la reddition de compte sont devenues évanescentes;
- La perte de l’expertise interne au profil de firmes externes, qui laisse la ville trop souvent impuissante face à ses responsabilités.
Les recommandations sont nombreuses. Certaines s’adressent au Gouvernement du Québec, plusieurs à la commission Charbonneau. Les termes reddition de compte, manque de rigueur et de cohésion, absence de contrôle reviennent souvent.
Nous soulignons certains constats généraux inquiétants :
- Manque de rigueur de la part des gestionnaires quant à leurs responsabilités, ainsi que de la part de la haute direction face à l’absence de conséquences pour les dits gestionnaires;
- (…) On note l’absence, dans plusieurs unités administratives, d’outils de planification et de gestion pourtant essentiels non seulement à une gestion efficace et efficiente, mais à une reddition de compte pertinente permettant aux instances supérieures une prise de décision éclairée.
Nous retenons entre autre une recommandation que nous jugeons cruciale :
- Revaloriser la fonction des gestionnaires et des employés en leur permettant d’exercer et d’élargir leurs compétences et d’assumer l’imputabilité.
À Montréal et dans plusieurs villes et municipalités, les problèmes de malversation, de collusion et de corruption découlent en général de failles dans la gestion, disons ici dans le cadre de gestion, des organisations. Par ailleurs, l’imprécision générale et la confusion des pouvoirs et de responsabilité entre les élus et les fonctionnaires offrent suffisamment de failles béantes et ouvertes à l’opportunisme de personnes malveillantes. Dans le cas de Montréal, les structures pour faire plaisir à tout le monde, des mouvements fusion-défusion ont apporté les dernières pierres dans l’engrenage administratif.
Ingouvernable veut dire : Ouverture à tous les scélérats, fripouilles, et autres crapules cachés dans les méandres des couloirs municipaux.
La commission Charbonneau produira aux termes de ses travaux des recommandations, dont certaines seront appliquées avant le rapport final. Le rapport Léonard apporte et complexifie la recherche de solutions simples. Que feront les autorités compétentes de toutes ces recommandations ?
Le gouvernement ajoutera des lois de nouvelles règles de façon à encadrer les élus et les gestionnaires. Ce principe d’action-réaction règlera-t-il le problème ?
À notre avis pas plus que toutes les lois, règles imposées aux municipalités et aux élus depuis 100 ans. Les juristes n’ont pas envisagé d’encadrer une fonction professionnelle, avec des pouvoirs liés à leur compétence et un code de déontologie au lieu de parler d’éthique personnelle ? Ils ont oublié de valoriser une profession !
Les juristes ont une approche coercitive, loin du droit point de salut. À coté de chaque gestionnaire municipal, il faudra bientôt engager un juriste pour lui dire ou placer les pieds. Nous allons augmenter simplement la confusion dans le partage des pouvoirs entre les élus et les fonctionnaires. Qui en profitera ?
Approche méthodologique classique
La méthode juridique classique qui consiste à règlementer de façon plus étroite les gestes des décideurs après la découverte de scandales et de malversation. Nous qualifions cette approche de processus linéaire, c’est-à-dire l’identification d’un processus par une liste d’instructions à faire les unes après les autres, isolant ce processus de sa finalité; une sorte de travail à la chaîne administrative pour en principe mieux le contrôler par des lois et une judiciarisation de la délinquance, le cas échéant. Pas de quoi valoriser l’intelligence et la compétence d’un gestionnaire.
Approche méthodologique par un véritable modèle intégré.( Approche matricielle)
À notre avis, la gestion municipale est une co-gestion entre le politique et l’administratif. Plusieurs paliers de gouvernance et décisionnels peuvent s’accrocher sérieusement si les règles du jeu et surtout les rôles et les pouvoirs ne sont pas harmonisés dans une approche totalement à l’inverse d’un processus linéaire normatif étroit. Nous proposons une approche managériale basée sur le modèle matriciel de Saine Gestion qui combine les fonctions classiques de gestion avec des principes de Transparence, Continuité, Efficience, Équilibre, Équité et Abnégation. Tous ces principes recoupent largement les recommandations du rapport Léonard. Elle a surtout l’avantage d’une approche de gestion intégrée et complète pour en assurer la réalisation.
Auditer la gestion municipale ?
L’approche Saine Gestion grâce à cette matrice devient aisément la base pour l’implantation du cadre de gestion, disons un cadre de Saine Gestion, dont l’une des caractéristiques intéressantes est d’offrir au gestionnaire le programme sur lequel il doit faire une reddition de compte. Bien humblement cette méthode, en l’absence d’une méthode transcendante, est la seule méthode assurant une véritable possibilité de procéder à un audit de la gestion (non comptable).
3 commentaires
Pour la question de l’imputabilité, il faut que les fonctionnaires mettent en place un système qui permettre aux acteurs ayant un rôle politique (décisionnel) de prendre des décisions justes et éclairées. Il est faut de prétendre que l’outil que sont les états financiers ou rapports annuels permettent de répondre à cette prérogative. Pour prétendre à l’imputabilité, il faut que le premier client du fonctionnaire soit l’élus, et le premier client de l’élus ses électeurs. Mais même dans cette dynamique, l’élus qui représenter un territoire va prendre des décisions en fonction de celui-ci, et non nécessaire dans l’intérêt du territoire supérieur, d’où la nécessité d’avoir une distribution adéquate des responsabilités. Le développement économique ne peut malheureusement pas se faire au niveau de l’arrondissement, Le taux chômage élevé à Montréal, comparativement à sa banlieue, en est la preuve.
L’application du cadre de Saine Gestion en milieu municipal serait une bonne application de vos propos. Intéressant de suivre aussi les travaux de l’ADGMQ à ce sujet. En particulier l’application du modèle de Saine Gestion pour les contrats municipaux……
L’application du cadre de saine gestion me semble bien difficile d’implantation dans certains milieux. Malgré la bonne volonté des nouveaux administrateurs de ces villes, malmenez par la commission Charbonneau, reste que les réflexes décisionnels, pris depuis plusieurs années par les gestionnaires en place, ne changeront pas. Pour ses derniers, la transparence, l’imputabilité et la reddition de compte restent des concepts qu’ils ne savent pas appliquer dans le quotidien. Pire encore, ils n’ont pas été habitués à cela. C’est toute une culture organisationnelle qu’il faudra changer et cela ne se fera pas sans heurts. Je suis encore très perplexe sur les meilleures pratiques à utiliser afin de déclencher une prise de conscience chez les gestionnaires et ainsi ouvrir la porte à des changements de mentalité et de méthodologie dans le travail.