Le modèle de Saine Gestion au pilori ?

Écrit par Bernard Brault le 14/02/2013

Il me faudrait une chronique humoristique pour décrire la comédie humaine qui nous est présentée depuis l’automne 2012 par la commission Charbonneau qui enquête avec rigueur sur la collusion dans la construction et autre magouille associée. Mais pour moi cela deviendrait un rire caustique, presque une nausée. Je ne suis pas le seul. Et pour cause !

Jour après jour, ad nauseam devant la commission Charbonneau, des dirigeants, des leaders, des fonctionnaires et des quidams viennent faire leur mea culpa avec repentir, plaidant  parfois la nécessité d’affaires mais surtout une forme d’innocence et d’absence d’intention criminelle. Un peu plus et je vais sortir mes mouchoirs. Certains deviennent même des vedettes, Lino Zambito est passé à Tout le monde en parle et est souvent un invité expert pour Paul Arcand à 98,5 FM. C’est peu dire !

Petite correction des faits

Malversation, collusion et financement occultes des partis politiques exigent des liquidités (du cash en bon québécois). Curieux, tous les invités de la commission semblent avoir manipulé pudiquement des sommes astronomiques : 15 000 $ par-ci 20 000 $ par là et cela plusieurs fois par mois, voire par semaine. À croire que La Banque du Canada a fait imprimer des billets juste pour la construction des infrastructures publiques à Montréal et à Laval.

Chers lecteurs et chères lectrices, avez-vous pensé combien de transactions irrégulières, de faux documents et de fausses factures il a fallu faire pour obtenir ces liquidités ? Surtout combien de complices et d’employés et de comptables ont dû être impliqués pour justifier la disparition de sommes importantes ayant été distribuées auprès des nécessiteux, fonctionnaires et politiciens ? Par ailleurs, la firme d’ingénieurs SNC-Lavalin découvre subitement, avec une surprise pudique, les transactions irrégulières engagées par son ex-président. Évidemment, on tentera de nous faire croire qu’il a manipulé à lui seul les 85 millions du fonds de la société, passées au su et au vu des vérificateurs comptables externes des centaines de transactions bidons, et que personne n’aura posé de question. C’est beau la confiance ! Non il faut être innocent ! ( au sens québécois, c’est à dire épais )

Trop de gens et gestionnaires ferment les yeux

Et on essaye encore de me faire croire qu’avec un petit cours sur l’éthique, trucs et astuces on va réussir à assainir la gestion, ramener les instincts de prédateur des grands leaders ! Vous y croyez franchement ? J’espère encore que le code de la route ne sera pas changé pour un code d’éthique !

Même s’il y a 50 % de ripoux, cela veut dire qu’il y a 50 % de gens intègres. Donc, je m’adresse à eux.

Des femmes, beaucoup moins d’hommes ?

L’approche du modèle intégré de Saine Gestion développé à l’origine pour les besoins de l’OAAQ, puis abandonné et repris par l’ISG en 2009, n’a jamais eu d’autre objet que d’encadrer une profession et les actes de ceux qui gèrent à titre de fiduciaire et de mandataire. Responsabiliser l’acte de gestion, appelé par la suite l’acte administratif,  en l’identifiant et  en précisant sa portée n’était pas à ce moment-là, une approche véritablement subversive. Mais elle le deviendra. L’approche, surtout celle de la matrice des 41 cases, qui permet de définir les règles de l’art de la profession, a commencé à irriter les tenants d’un leadership moyenâgeux et encore englué dans des privilèges féodaux.

Tenants d’un leadership moyenâgeux

Je peux comprendre en effet qu’un système, modèle d’un cadre de gestion autocontraignant, qui permet un audit permanent de la gestion et responsabilise l’acte administratif posé par des décideurs puisse devenir une calamité pour beaucoup de leaders.

Au fil des années, j’ai noté plusieurs commentaires démontrant le malaise que provoque parfois Saine Gestion. Surtout chez les hommes, beaucoup moins chez les femmes, mais encore là, cette opinion ne découle que d’un petit échantillon aléatoire et non scientifique et n’engage que moi.

J’ai décidé de vous en confier quelques-uns pour porter ma réflexion plus loin sur la nature humaine, et surtout pour évaluer la route parcourue depuis 1989, année de la création du concept.

Regardons un premier commentaire.

Votre approche brime un droit fondamental humain de tricher, de mentir, de voler et de s’en tirer à bon compte. 

À ce commentaire je n’ai pas de réponse. C’est peut-être pour ça que les religions sont nées, et que Dieu guide les croyants entre les vicissitudes humaines.

Des milliers de gens qui œuvrent dans les pays du tiers-monde le font pour des raisons monétaires. Gros pactole, corruption, immunité. Une réputation se lave mieux avec beaucoup d’argent. La loi du plus fort restera toujours la meilleure.

Cela explique le silence ou la gêne éloquente de plusieurs amis et collègues œuvrant encore dans des pays lointains, dont les systèmes politiques nécessitent corruption et collusion pour ramasser les contrats. Montréal fait partie aussi du tiers-monde, et j’ai perdu beaucoup d’amis !

Le système que véhicule votre organisme est brillant. Trop, simplement. Il culpabilise tous les décideurs et les paralyse dans leurs motivations. Peut-être que la profession est trop dure et que tous les décideurs, s’ils n’étaient pas motivés par l’appât du gain ne feraient pas ce métier. 

Probable, ce qui me surprend cependant c’est que l’on accepte aisément de payer des taxes sachant que l’on se fait soutirer des sommes colossales par des maires corrompus. À part de s’indigner, personne n’agit ou ne propose de solution viable. Personne ne pense aussi qu’il y a des gens qui se font abuser par ces gestionnaires sans foi ni loi. Avons-nous collectivement le syndrome de la femme battue ?

Sans nécessairement être mal intentionné au début de leur carrière, qui voudrait d’un système qui les contraint et les place dans un état de reddition de comptes permanent.

En effet, à part quelques dirigeants intègres à géométrie non variable, qui aurait engagé un gestionnaire à Montréal ou à Laval, dont la déontologie aurait obligé une Saine Gestion ?

Les leaders sont des joueurs de poker qui veulent gambler, pour gagner, vous les en empêchez. Un peu comme si vous aviez une pilule universelle pour identifier les tricheurs. Aux Jeux Olympiques, si plus personne ne pouvait tricher il n’y aurait plus de Jeux.

Tricher, c’est aussi voler. Bon l’équipe antidopage, travaillerait pour rien. Comme Saine Gestion ?


1 commentaire

par Claude le 03/22/2013

Ils peuvent bien vous avoir mené au pilori ces crasseux de gestionnaires, quand on voit ce qu’il ont fait dans les années 2000-2009.

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